Optique non linéaire
La lumière est associée à un champ électromagnétique,
avec une composante électrique et une composante magnétique.
D’autres champs électriques existent, de diverses origines, pouvant
provenir de la structure interne de certains matériaux ou bien résulter
de l’application d’une tension.
L'optique non linéaire au sens large regroupe l'ensemble des phénomènes
optiques présentant une réponse non linéaire par rapport
à ces champs électriques. S’il s’agit d’une
interaction entre le champ électromagnétique et un champ appliqué,
on parle d’effets électro-optiques. S’il s’agit d’effets
non linéaires liés uniquement à des champs électromagnétiques,
on parle alors d’optique non linéaire au sens strict, avec des
conversions de longueurs d’onde (génération d’harmoniques,
fluorescence paramétrique) ou encore des effets de variation d’indices
entraînant l’auto-focalisation ou l’auto-défocalisation
d’un faisceau, etc…
Au CRHEA on s’intéresse principalement à la conversion
de longueur d’onde résultant d'un effet non linéaire d'ordre
2 : génération de seconde harmonique, de somme et de différence
de fréquence et fluorescence paramétrique. Dans le premier cas,
deux photons hν créent un photon h2ν. Dans le dernier cas, un
photon hν se coupe en deux photons hν1 et hν2
tels que hν = hν1 + hν2.
Ces processus n’interviennent que dans des milieux qui ne possèdent
pas de centre de symé?trie, et où, à partir d'un certain
niveau d'excitation, la réponse ou polarisation du matériau,
présente des termes non linéaires non négligeables et
qui peuvent ainsi engendrer des champs électriques nouveaux dont les
fréquences sont la somme ou la différence des fréquences
des faisceaux incidents.
Au CRHEA, le matériau non linéaire utilisé est le nitrure
de gallium (GaN) et ses alliages (AlGaN) et les recherches portent principalement
sur la génération de seconde harmonique. Un objectif important
est de profiter de la transparence de ces matériaux dans l’ultraviolet
pour réaliser des sources UV cohérentes en partant de laser
visibles facilement accessibles tels que les diodes lasers InGaN entre 400
et 500 nm. La conversion non linéaire est obtenue par interaction entre
les modes se propageant dans des structures fines appelées guides d'ondes
dans lesquels ont peut atteindre de forte densité de puissance pour
des puissances incidentes relativement faibles.
Pour la réalisation expérimentale, la première difficulté
est d’obtenir des guides à faibles pertes à la propagation
(<1dB/cm). Dans le visible, la diffusion par la rugosité des interfaces
et surfaces devient un problème sévère. Nous avons établi
que cette diffusion est le facteur limitant si on ne prend pas un soin particulier
pour obtenir des surfaces lisses. Nous avons aussi établi que les couches
avec des densités de dislocations importantes comme les premières
couches de nitrures sur saphir ou sur Si introduisent des pertes importantes.
Au final, nous avons mis au point une technique qui combine l’épitaxie
par jets moléculaires et l’épitaxie en phase vapeur et
qui permet de réduire au minimum la rugosité à grande
échelle et à petite échelle, et nous avons obtenu des
pertes inférieures à 1 dB/cm pour le mode fondamental et à
peine plus pour les ordres supérieurs.
La deuxième difficulté est d'obtenir l’accord de phase entre les modes couplés par l'effet non linéaire. La génération de seconde harmonique se fait tout au long du guide, et il faut veiller à ce qu'au bout d'une certaine distance de propagation, l’onde harmonique créée au début du guide ne se retrouve pas en opposition de phase avec l’harmonique générée en ce point. Il faut donc trouver un moyen pour que l’onde initiale et l’harmonique se propagent à la même vitesse, avec le même indice optique. L’indice variant avec la longueur d’onde, le problème paraît insoluble. Mais on peut tirer parti de la variation de l’indice avec d’autres facteurs, comme la forme du mode optique, pour contre-balancer la variation avec la longueur d’onde : c’est l’accord de phase modal. Dans les guides GaN/AlGaN, on peut trouver un tel accord de phase modal. On peut aussi le trouver dans des microdisques avec les modes qui se propagent à la périphérie du disque (modes de galerie). On peut enfin le trouver dans des cavités résonnantes telles que les cristaux photoniques. Toutes ces structures ont été étudiées et ont permis de démontrer la génération de seconde (voire troisième) harmonique. Pour l’heure, les meilleurs rendements de conversion ont été obtenus dans des guides d'onde et sont de l’ordre de 2%.